Achat

Quels sont les recours de l’acquéreur en cas de défaillance du vendeur ?

Mis à jour le
7 minutes de lecture

Rédigé par un service juridique partenaire.

Dans le cadre de la vente d’un bien immobilier, le vendeur a l’obligation d’informer l’acquéreur de tout vice, désordre ou encore projet de construction impactant le bien et par ricochet l’acquéreur. Cette information se matérialise par une clause expresse du compromis de vente, sans laquelle l’acquéreur peut s’attendre légitimement à acquérir un bien en bon état, sans défaut manifeste. Dans le cas où le bien vendu serait impacté par des désordres et que l’acquéreur n’en ait pas été informé au préalable, ce dernier peut engager la responsabilité du vendeur en arguant le défaut d’information, l’éventuelle existence de vices cachés et demander l’allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

 

Vendeur, informez votre acquéreur !

 

L'obligation d’information de l'acheteur pesant sur le vendeur est une de ses obligations principales. En tant que vendeur, vous devez informer l’acquéreur avec exactitude sur l’état du bien vendu. Le moindre désordre doit être porté à sa connaissance. Comment procéder ? Il peut être opportun d’attirer son attention sur certains faits lors de la visite et de doubler cette information verbale par une information écrite et détaillée dans le compromis de vente.

En parallèle, le vendeur a aussi une obligation de délivrance vis-à-vis de l’acquéreur. Une fois l’acte authentique signé, il doit délivrer le bien à l’acquéreur évidemment, mais ce bien doit être délivré conformément à sa description dans l’acte de vente et dans la promesse. Sans mention spécifique dans l’acte, l’acquéreur s'attend, légitimement, à recevoir un bien sans désordre particulier.

Si le bien présente des désordres, des vices cachés, des malfaçons n’ayant pas été portés à la connaissance de l’acquéreur, sachez que ce dernier peut se retourner contre le vendeur, demander des dommages et intérêts en réparation de son préjudice, et éventuellement, selon la gravité des désordres demander l’annulation de la vente.

 

Attention : Il ne suffit pas de délivrer des informations verbalement à l’acquéreur. Le verbal ne vaut rien juridiquement et il est très difficile, voire impossible, de rapporter la preuve d’avoir rempli votre obligation d’information si celle-ci est restée verbale. Pour assurer la parfaite compréhension et information de l’acquéreur, il est essentiel d’insérer une clause dans la promesse de vente.

 

La spécificité des vices cachés

Il est tentant d’assimiler n’importe quel désordre à un vice caché et espérer obtenir une annulation de la vente. Toutefois, pour qualifier un vice de vice caché au sens juridique du terme, il est nécessaire que diverses conditions soient remplies. Mais attention, les sanctions correspondantes sont lourdes.

Reprenons tout d’abord la définition juridique des vices cachés. L’article 1641 du code civil rappelle que “Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus”.

Plusieurs conditions cumulatives sont nécessaires pour que cette qualification soit retenue. Le vice doit :

  • Être caché, c’est-à-dire que le vendeur doit en avoir connaissance et l’avoir caché de façon intentionnelle à l’acquéreur,
  • Rendre le bien impropre à sa destination (impossibilité d’y habiter par exemple pour un bien à usage d’habitation),
  • Être inconnu de l’acquéreur,
  • Être antérieur à la vente.

 

A noter que le vendeur n’est pas tenu des défauts du bien dont l’acquéreur a pu se convaincre lui-même. Le vendeur n’est pas non plus responsable des vices dont il n’avait, lui-même, pas connaissance.

A noter : Même si, traditionnellement,  les actes de vente précisent que les vendeurs non professionnels ne garantissent pas les vices cachés, cette clause de non garantie est écartée s’il est prouvé que le vendeur connaissait ou ne pouvait ignorer le désordre.

 

Des sanctions lourdes 

Les vices cachés comme le défaut de délivrance conforme peuvent être sanctionnés par la nullité de la vente ou l’allocation de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

La jurisprudence est foisonnante sur le sujet et de nombreux exemples illustrent les sanctions prises par les juges.

 

Dans une affaire jugée en 2015, un vendeur déclare dans un acte authentique, “sous sa seule responsabilité, que le bien vendu est raccordé à l’assainissement communal”. Deux ans plus tard, des odeurs nauséabondes apparaissent. Suite à une l’expertise d’un professionnel diligentée à l’initiative des acquéreurs, nouveaux propriétaires,  il apparaît que les odeurs sont dues à l'absence de vidanges de la fosse septique. Le bien n'était pas raccordé à l'assainissement communal comme le déclarait le vendeur. Cette fausse déclaration engage la responsabilité du vendeur qui est condamné à verser des dommages et intérêts pour défaut de délivrance conforme. Le bien vendu n'est pas conforme aux dispositions prévues dans l'acte de vente.

 

Dans une autre affaire, un compromis de vente est signé pour la vente d'un bien comportant une extension. Plusieurs semaines après la signature du compromis, les acquéreurs sont informés de l'irrégularité de cette extension et demandent l'annulation du compromis de vente. Dans un arrêt du 21 octobre 2014, la Cour de cassation retient la responsabilité du vendeur pour réticence dolosive, annule le compromis de vente et octroie des dommages et intérêts aux acquéreurs préjudiciés.

 

Autre exemple :  En août 2014 une vente est signée. En octobre de la même année, des infiltrations d'eau ont lieu du fait du pourrissement avancé de la charpente. Les acquéreurs agissent contre le vendeur et demandent la nullité de la vente et l'allocation de dommages et intérêts. Dans un arrêt du 21 janvier 2015, les juges ont retenu la responsabilité du vendeur pour vice caché. Le vendeur avait connaissance de cette situation. Ce point a été mis en avant par le fait que le vendeur avait fait établir des devis pour des travaux sur la charpente et avait repeint les tâches dues aux précédentes infiltrations pour les camoufler.

 

Notons toutefois que dans certains cas, les juges sont plus cléments envers les vendeurs et rejettent la responsabilité du vendeur.  Ainsi dans un arrêt du 9 décembre 2014, la Cour de cassation a rejeté la demande d'indemnisation des acquéreurs. Une maison de plus de 200 ans avec des colombages a été vendue. Sur la façade avant, il était visible que certains bois étaient pourris et sur la façade arrière, après démontage des ardoises, le même problème est apparu du fait d'infiltrations sur le bien. Les acquéreurs ont agi contre le vendeur pour obtenir une indemnisation sur le fondement des vices cachés.  La Cour de cassation retient qu'il ne s'agit pas d'un vice caché, le pourrissement avancé du bois sur la façade avant étant visible des acquéreurs.

 

Focus sur l’obligation de l’acquéreur de s’informer :

Dans certains cas, les juges rejettent non seulement la responsabilité des vendeurs mais rappellent l'obligation des acquéreurs de se renseigner par eux-mêmes. C'est le cas notamment des acquéreurs qui ont la qualité de professionnels.

À titre d'exemple, dans un arrêt du 16 septembre 2014 ou encore dans un autre arrêt du 26 janvier 2022, les juges ont considéré qu’il appartient à l'acquéreur professionnel de se renseigner lui-même ou de procéder à des vérifications élémentaires lui permettant d’obtenir les renseignements adéquats.

 

Sources : 

  • Articles 1641 et suivants du code civil
  • Articles 1137 et suivants du code civil
  • Cour de cassation, 21 décembre 2023, nº 22-20045
  • Cass. 3è civ. 28 janvier 2015, n° 13-19945
  • Cass. 3e civ., 21 octobre 2014, n°  13-12433 
  • Cass. 3è civ., 21 janvier 2015, n°13-17982
  • Cass. 1ère civ. 16 septembre 2014, n° 13-20571
  • Cour d'appel de Basse-terre, 28 novembre 2024, nº 22/01115
  • Cass. 3e civ., 9 décembre 2014, n°13-24765
  • Cour de cassation, Troisième Chambre civile, Arrêt nº 70 du 26 janvier 2022, Pourvoi nº 18-23578